Accueil > Médias & Audiovisuel > Abonnements en ligne > Abonnements numériques (1/2) : la croissance des médias d’information en ligne payants se stabilise en 2021 Abonnements numériques (1/2) : la croissance des médias d’information en ligne payants se stabilise en 2021 Après une année 2020 exceptionnelle, les principaux médias d’information ont connu un ralentissement de leur croissance du nombre d’abonnés en ligne en 2021. L’enjeu n’est plus seulement de convertir de nouvelles audiences, éloignées de leur cœur de cible, mais aussi d'améliorer le taux de rétention. Pour la cinquième année consécutive, mind Media a réuni les chiffres d’une vingtaine d’éditeurs représentant une quarantaine de sites d’information. Par Aymeric Marolleau et Paul Roy. Publié le 16 mars 2022 à 15h39 - Mis à jour le 18 janvier 2024 à 17h04 Ressources Cet article est le premier d’un dossier en deux parties sur les stratégies d’acquisition et de rétention des abonnés purs numériques des éditeurs français : Le classement annuel des médias en ligne payants Comment les éditeurs ont-ils fait évoluer leurs offres en 2021 ? Au total, les 34 titres dont nous disposons des chiffres de 2020 et 2021 ont vu le nombre global de leurs lecteurs payants passer de 1,9 million à 2,12 millions, soit un gain de 220 000 abonnements (+11,6 %, contre 34,7 % en 2020). Bien sûr, un internaute peut être abonné à plusieurs titres à la fois. Le classement des éditeurs français qui ont le plus d’abonnés purs numériques Cinq titres au-dessus de 200 000 abonnés Le Monde et L’Équipe restent les éditeurs qui comptent le plus grand nombre d’abonnés en ligne, respectivement 418 000 et 340 000 (dont environ 30 % en direct, les autres via des accords de commercialisation noués avec Canal+ et Bouygues Télécom). Ils devancent Le Figaro (250 000), Que Choisir (215 000), Médiapart (214 000) et Ouest France (159 000). Parmi les titres de la presse quotidienne régionale, seuls Ouest France, Le Parisien – qui avec leurs offres et leur niveau de performances, concourent directement avec les titres PQN -, La Dépêche et Sud Ouest (36 000 abonnés fin 2021) ont accepté de partager leurs chiffres avec nous. Certains d’entre eux n’auraient pourtant pas à rougir : Nice Matin avait 14 500 abonnés purs numériques fin 2020 et La Voix du Nord 20 500 fin 2019. Abonnements numériques (1/2) : le classement 2020 des médias en ligne payants Que Choisir domine toujours, de loin, la catégorie des magazines et hebdomadaires, quoique son rythme de croissance se soit ralenti l’an dernier (+1,3 %). Il devance Courrier International, qui a perdu un millier d’abonnés (-2,5 %) après en avoir gagné 20 000 en 2020, et Le Point, qui en a gagné 5 000 (+14,7 %). Début 2020, en lançant sa nouvelle formule, L’Express ambitionnait d’atteindre 200 000 abonnés purs numériques d’ici début 2024. Le titre en avait 25 000 en septembre 2021, selon Le Figaro, et n’a pas partagé ses derniers chiffres avec nous. Nous ignorons aussi les progrès réalisés par Science & Avenir et Challenges (respectivement 12 000 et 10 250 fin 2020), du groupe Perdriel. Le groupe Prisma Media, qui n’a pas souhaité communiquer ses chiffres par titre, comptait 6 116 abonnés numériques fin 2021, en baisse (7 671 en 2020). Parmi les pure players et les newsletters, Arrêt sur Images qui comptait 23 300 lecteurs payants en ligne il y a deux ans, en enregistre aujourd’hui 22 500. Brief.me et Les Jours ont également dépassé la barre symbolique des 10 000 abonnés. Le média en ligne d’investigation locale Médiacités en avait 4 500 en octobre, selon Le Monde. Croissance ralentie en 2021 En 2020, la pandémie avait considérablement accéléré le recrutement de nouveaux abonnés (+61 % pour Le Monde, +33 % pour Le Figaro, +145 % pour Libération, +74 % pour Le Parisien…). La fièvre est retombée l’an dernier. En haut du classement, à l’exception de Que Choisir, qui n’a augmenté le nombre de ses lecteurs numériques payants que de 1,3 %, et Médiapart, qui en a perdu 2,1 %, tous ont connu peu ou prou les mêmes progrès : +16,5 % pour Le Figaro, +15,5 % pour Ouest France, +15 % pour Le Monde et L’Équipe. Il faut descendre plus bas pour trouver des rythmes plus élevés : +23 % pour L’Obs, +24,5 % pour Libération et +24,7 % pour Le Parisien. Outre Que Choisir et Médiapart, l’année a été plus délicate pour Courrier International (-2,5 %), Télérama (-8,9 %) ou encore Les Jours (-9,3 %, à 10 244 abonnés) après une année 2020 de très forte croissance. “Après notre plus haut historique post-campagne d’appel aux abonnements, à l’automne 2020, 2021 a été l’année de la consolidation. Nous nous sommes concentrés sur l’ARPU et la maîtrise du churn (taux d’attrition), afin de préserver notre équilibre économique. 2021 sera notre premier exercice comptable bénéficiaire”, précise son directeur général, Augustin Naepels. Un enjeu d’amélioration du taux de rétention En effet, si les titres de presse ont profité de la forte hausse d’audience pendant la crise sanitaire pour acquérir de nouveaux abonnés, ce fut souvent au moyen d’offres agressives, auxquelles ont souscrit des lecteurs de plus en plus éloignés de leur cœur de cible. Dans ces conditions, une hausse du taux d’attrition était difficilement évitable. La croissance de nouveaux abonnés numériques au Monde est ainsi passée de 65 % en 2020 à 15 % en 2021, malgré une année encore très bonne en matière de recrutement, notamment au premier semestre, selon Lou Grasser, directrice marketing et produit du titre. “Tous nos efforts se concentrent aujourd’hui sur le taux de rétention”, indique-t-elle. Le groupe travaille ainsi à l’intégration courant 2022 d’algorithmes anti-churn, calculant la propension à se réabonner ou se désabonner des utilisateurs, à son outil propriétaire d’analyse de données Forecast. Ils permettront ensuite de proposer différents scénarios, encore en réflexion (appel, envoi d’un mail, push ciblé, etc.). “La limitation du churn passe aussi par de la relation client sur le site ou l’application, avec des messages aux abonnés rappelant la date d’expiration de la carte bancaire (une cause majeure d’augmentation du taux d’attrition pour certains éditeurs, ndlr) ou la date de fin d’abonnement”, explique Alessandro Massi, chief digital officer de TBS Group, société spécialisée dans la gestion et la facturation des abonnements. Le groupe les Echos – Le Parisien, qui a également fait de l’usage des données pour l’abonnement et la publicité un de ses axes de développement stratégique – au travers du projet One (lire notre interview de Pierre Louette) – , rapporte avoir davantage mis en avant les abonnements annuels pour se protéger des désabonnements. “Nous avions tendance à promouvoir les abonnements mensuels, mais une bascule a été opérée à partir de novembre 2020 sur les Echos et juin 2021 pour le Parisien (notamment avec une offre à 1 euro le premier mois pour l’abonnement annuel, ndlr) pour mieux maîtriser le churn de nos abonnés”, explique Lise Benamou, la directrice marketing client du groupe. Cette problématique de la rétention est, selon Marion Wyss, directrice marketing de Poool, déjà bien prise en main par les éditeurs de la presse professionnelle avec des pratiques telles que “le suivi du comportement des abonnés dans les premiers jours”, ou encore un appel de bienvenue pour les nouveaux abonnés. Le Point : Croître sans dégrader le revenu net par abonné Grâce à une hausse de 14,7 % en 2021, Le Point est le dixième titre à avoir dépassé la barre des 40 000 abonnés. “Nous avons accéléré la stratégie paid sur les réseaux sociaux, développé le parc applicatif, dynamisé les messages contextuels et intensifié les dispositifs d’embasement, pour collecter les adresses mail prospect (via par exemple l’inscription aux newsletters, la création de compte, la participation à un jeu concours)”, explique Sidonie Mabille, directrice marketing abonnement. “Nous pourrions avoir une croissance plus forte, mais même lorsque nous faisons des offres promotionnelles, on ne veut pas brader nos tarifs sur la durée et dévaloriser notre offre. En 2021, le revenu par abonné a été amélioré, ce qui participe à la croissance de notre chiffre d’affaires lié à l’abonnement. Nous veillons à faire grandir la taille de notre portefeuille tout en restant vigilants sur le revenu net par abonné en fonction des différentes cohortes”, expliquait à mind media le directeur général du Point, Renaud Grand-Clément, en début d’année. Optimiser les tunnels d’acquisition L’optimisation de l’acquisition n’en reste pas moins un chantier majeur pour les éditeurs interrogés. Mi-2021, le Monde a ainsi lancé une nouvelle version de son application, “pensée pour garder les abonnés, et solliciter l’abonnement”, explique Louis Grasser. Côté acquisition, les résultats de la refonte de l’application du Monde sont probants, avec une augmentation de 38 % du nombre de nouveaux abonnés via l’application depuis son lancement et une hausse de 8 points de sa part dans la répartition des canaux d’acquisition de nouveaux souscripteurs. Le groupe indique également être en train d’internaliser la gestion de son tunnel d’acquisition, déjà en production sur l’offre Essentiel du Monde, jusque-là opérée par son prestataire, Majorel. “Cela nous a permis de diviser le temps de chargement du tunnel par deux, et de nous assurer d’un workflow de connexion optimal de nos abonnés, du début à la fin du parcours d’abonnement”, explique Lou Grasser (Le Monde). Car la connexion des utilisateurs, dont l’enjeu est bien identifié côté publicitaire, est aussi un moyen d’optimiser l’acquisition de nouveaux abonnés. “Sur la partie loguée, l’objectif est pour le moment de fidéliser, de générer davantage d’engagement, plus de lecteurs et donc plus d’inventaires disponibles, et d’alimenter une stratégie de développement des abonnés, qui passe par la connaissance des parcours et le déploiement de fonctionnalités réservées”, nous expliquait en février Karine Rielland-Mardirossian, directrice générale déléguée digital de la régie du Figaro. Après cookies : le lent développement des alliances de login commun Selon Marion Wyss, “quand le taux de conversion est de 0,01 % sur les visiteurs non authentifiés mensuels, il peut atteindre 0,8 % sur les utilisateurs connectés, voire beaucoup plus”. À titre d’exemple, le magazine féminin Elle avait d’abord imposé un registration wall à ses utilisateurs avant de lancer son offre payante en 2020, pour travailler sur une base de prospects déjà engagés. L’Équipe : contenus, connaissance des lecteurs gratuits et segmentation des offres En 2020, malgré l’arrêt des compétitions sportives pendant le premier confinement et l’annulation des grands événements de l’été, L’Équipe avait maintenu à +14 % la croissance de ses abonnés numériques grâce à une offre défensive à 1 euro par mois pendant six mois. Sa croissance a été à peu près équivalente en 2021, avec +15 %. Emmanuel Alix, directeur numérique du média sportif, qui vise 450 000 abonnés numériques, détaille la stratégie mise en œuvre, qui “a reposé sur trois éléments clés. Premièrement, nous avons développé l’offre de contenus avec notamment le lancement de L’Équipe Explore”. En septembre, le directeur général du groupe, Laurent Prud’homme, indiquait ainsi à mind Media que 24 % des recrutements d’abonnés sont réalisés par L’Équipe Explore, grâce à des documentaires originaux. “Les grandes compétitions (…) suscitent un intérêt instantané pour l’abonnement, presque impulsif, alors que les contenus de la rubrique Explore nous permettent toute l’année d’attirer des audiences et de les transformer en abonnés. C’est complémentaire. “Deuxièmement, poursuit Emmanuel Alix, nous avons désormais une meilleure connaissance de nos lecteurs gratuits grâce au lancement de L’Équipe Live, plateforme de streaming d’événements sportifs, qui nous permet d’augmenter le nombre de lecteurs connectés. Troisièmement, une politique agressive et adaptée en termes de prix et d’engagement de nos abonnés, avec le lancement d’une gamme d’offres en mai (7,99 €, 9,99 € et 13,99 € par mois, ndlr).” Méthodologie Concernant le nombre d’abonnés purs numériques des titres, notre étude se fonde pour l’essentiel sur des éléments déclaratifs indiqués par les éditeurs recensés dans le tableau à mind Media entre février et mars 2021. Il s’agit aussi, dans quelques cas, de chiffres partagés publiquement par les éditeurs. Nous avons demandé aux éditeurs de partager avec nous leur nombre d’abonnés purs numériques au 31 décembre (donc uniquement offres non couplées au papier) : Hors forfaits “multi-titres” et illimités (Cafeyn, SFR Presse, ePresse, Pressmium…). Hors abonnements professionnels non-individuels. Diffusion par tiers (sociétés, collectivités territoriales, associations, syndicats…) inclus. Offres d’essai (premier mois à 1 euro par exemple) incluses. Si certaines de leurs offres permettent à plusieurs internautes / comptes de s’y connecter (packs et familles), nous leur avons demandé de ne compter qu’un seul abonné par abonnement.Nous privilégions les chiffres déclaratifs à ceux de l’ACPM connus comme “versions numériques”, qui ont évidemment leurs qualités, pour des raisons méthodologiques. Ses “diffusions versions numériques individuelles” ne tiennent compte que des offres qui incluent une version PDF du titre, ce qui exclut les offres, de plus en plus nombreuses, qui ne donnent accès qu’au contenu du site et de l’application mobile. Elles ne tiennent pas non plus compte des offres dont le prix est inférieur à 25 % du tarif de référence du papier, ce qui exclut les offres les plus agressives, notamment les premiers mois à 1 euro. Quoiqu’il soit en concurrence avec les titres de PQN, nous avons classé Le Parisien comme appartenant à la PQR. De même, bien qu’il soit également en concurrence avec les titres de PQN, nous avons classé Médiapart dans la catégorie des pure players. Par souci d’exhaustivité, certains des chiffres que nous publions sont issus de déclarations publiques ou d’articles de presse récents, à l’instar de ceux du Télégramme, de La Provence et de Médiacités. Il n’est donc pas certain qu’ils répondent à nos critères méthodologiques, ce qui rend délicate la comparaison exacte entre les titres de notre panel. La comparaison année par année est également rendue délicate par l’évolution de notre méthodologie. Pour toute question ou remarque, contactez-nous : datalab@mind.eu.com Aymeric Marolleau et Paul Roy Abonnements numériquesInformation localePQN Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Le classement des éditeurs français qui ont le plus d'abonnés purs numériques L'évolution du nombre d'abonnés purs numériques des principaux sites d'information français Entretiens Renaud Grand-Clément (Le Point) : "Nous sommes redevenus légèrement bénéficiaires en 2021" Les Echos retrouve l'équilibre financier, Le Parisien l'espère en 2025 Analyses Etudes de cas Comment CMI organise l’engagement et la fidélisation des lecteurs sur l'offre numérique du magazine Elle Le Monde dépasse 500 000 abonnés, dont 83 % exclusivement numériques Entretiens Edouard Coudurier (Groupe Le Télégramme) : "Nous souhaitons faire des acquisitions dans de nouvelles activités médias" essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché Les mutations du search à l'ère de l'IA générative L'application inaboutie de la loi sur les droits voisins Google vs DOJ : tout ce qu'il faut savoir sur le procès qui pourrait redéfinir l'adtech L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction Pierre Louette (Apig / Les Échos-Le Parisien) : “Nous devons rendre les textes législatifs plus contraignants pour les plateformes” Comment l'IA peut-elle contribuer à l'efficacité des stratégies de monétisation publicitaire des régies ? 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