Accueil > Services bancaires > [Info mind Fintech] Fin de parcours pour la néobanque à impact OnlyOne [Info mind Fintech] Fin de parcours pour la néobanque à impact OnlyOne À la suite du désengagement d’un nouvel investisseur, la néobanque verte OnlyOne a été placée en liquidation judiciaire. Son pivot vers le BtoB n’a donc pas dépassé l’étape du bêta-test. Par Caroline Soutarson. Publié le 21 février 2025 à 18h03 - Mis à jour le 23 avril 2025 à 12h07 Ressources Après s’être déclarée en cessation de paiements le 29 janvier 2025 auprès du tribunal des activités économiques de Paris, la néobanque à impact OnlyOne a été placée en liquidation judiciaire dans un jugement prononcé le 12 février, selon un document consulté par mind Fintech. Avec un passif de 2,47 millions d’euros, dont 365 648 euros exigibles, et un actif de 736 722 euros, dont 575 euros disponibles, “l’entreprise est manifestement dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible”, conclut le tribunal. Une promesse d’investissement non tenue Le tribunal de commerce estime en outre qu’un redressement judiciaire est inenvisageable (demande initiale de la société) en raison d’un “engagement de l’investisseur non honoré”, d’une “perte de crédibilité” et d’un “retard de salaires depuis novembre 2024”. À ce titre, la date de cessation de paiements d’OnlyOne est fixée au 30 novembre 2024. Le tribunal prévoit un délai de deux ans pour clôturer la procédure, lors d’une audience publique qui aura lieu le 11 février 2027. Interrogé par mind Fintech, le cofondateur et président d’OnlyOne, Kamel Naït-Outaleb, revient sur les raisons qui ont conduit l’entreprise à cette situation. Fin 2023, en quête de fonds depuis plus d’un an, l’entreprise – qui avait même entamé une campagne de crowdequity sur Sowefund pour lever 850 000 euros – trouve finalement un investisseur institutionnel intéressé. “Nous avons donc stoppé la campagne de crowdfunding”, précise Kamel Naït-Outaleb. Le contrat est signé début 2024 et “l’investisseur verse une première partie des fonds, mais pas la seconde [prévue ultérieurement, Ndlr]. Dans ce contexte, nous nous déclarons en cessation de paiements pour protéger les salariés : quatre développeurs, une designeuse et quatre alternants”, indique le cofondateur. Un chiffre d’affaires de 58 822 euros en 2023 Lancée en avril 2021, la néobanque verte revendiquait, au plus fort de son activité fin 2022, 3 000 personnes allées “au bout du processus d’inscription (KYC et virement bancaire)”, nous confiait alors Kamel Naït-Outaleb. Un chiffre bien en-deçà de son objectif initial d’atteindre 10 000 utilisateurs fin 2021, et également inférieur aux résultats de ses deux concurrents, Helios et Green-Got. Dans ce contexte, OnlyOne avait annoncé préparer un élargissement de son offre auprès des entreprises, toujours avec sa thématique à impact, misant sur l’essor de la RSE dans les entreprises. Pour les néobanques vertes, les comptes premiums deviennent une priorité Lors d’une interview accordée à mind Fintech en septembre 2023, les dirigeants indiquaient que le nombre de clients particuliers avait chuté de moitié, à 1 500. Selon le document du tribunal, la start-up a enregistré cette année-là un chiffre d’affaires de 58 822 euros. La direction de l’entreprise précisait alors qu’elle se donnait six à douze mois pour statuer sur l’avenir de son activité BtoC, sans chercher à améliorer les services associés durant cette période. Une offre BtoB qui n’a jamais été commercialisée Cependant, l’abandon progressif du BtoC n’a finalement jamais donné lieu à la mise en route de l’activité en BtoB. Une phase de bêta-test a été mise en place au premier semestre 2024, “avec une vingtaine d’entreprises”, assure Kamel Naït-Outaleb. Selon le dirigeant, le second versement attendu de l’investisseur constituait la dernière étape avant le déploiement de l’offre BtoB à un public élargi. “Nous avions travaillé 18 mois sur notre nouvelle proposition de valeur, nous avions refait notre branding, 350 entreprises s’étaient inscrites sur notre liste d’attente… Tout était prêt pour passer à la phase commerciale”, affirme-t-il. Désormais, il est nécessaire de trouver une solution de repli pour la vingtaine d’entreprises en test, ainsi que pour “environ 700 clients particuliers”. Le président d’OnlyOne ignore toutefois encore ce qu’il adviendra de ces clients. “Nous devons en discuter avec Treezor [plateforme de Banking-as-a-Service sur laquelle se repose OnlyOne, Ndlr] et avec notre liquidateur judiciaire.” Concernant les actifs immatériels, le dirigeant ne sait pas encore précisément ce qui pourrait être cédé. Sur le segment BtoC, la plateforme avait développé un service de scan de tickets de caisse basé sur la reconnaissance optique des caractères (OCR), ainsi qu’un calculateur de l’empreinte carbone des dépenses. Manque de financement Le revirement de l’investisseur institutionnel et la dépendance d’OnlyOne à celui-ci sont révélateurs de la fragilité du financement de la fintech. Après une levée de fonds en amorçage auprès de business angels, OnlyOne avait eu du mal à trouver un investisseur. “Nous aurions aimé lever des fonds cette année, mais il y a eu un ralentissement au niveau des financements late-stage, qui s’est répercuté sur les financements en Série A”, déplorait Kamel Naït-Outaleb fin 2022. Faute d’investisseurs, OnlyOne avait dû se contenter en novembre 2022 d’un engagement d’investissement de GEM Global Yield (GGY), un groupe d’investissement alternatif basé au Luxembourg. “GGY s’est engagé de manière ferme à investir 35 millions d’euros en titres à partir du moment où nous serons cotés. Nous espérons que cet engagement nous permettra d’obtenir d’autres investissements”, déclarait alors le président d’OnlyOne. Au bout du compte, l’investisseur institutionnel arrivé en 2024 a obtenu “environ 10 % du capital. Le reste est réparti entre nos investisseurs historiques, des business angels, et nous, les cofondateurs”, détaille Kamel Naït-Outaleb. Les sociétés de capital-risque ont en effet souvent peu d’appétence pour les modèles BtoC. Parmi les néobanques à impact, Helios a été la mieux lotie à cet égard, en bouclant une levée de fonds en pré-amorçage de 1,5 million d’euros auprès de Raise et Plug and Play, puis une Série A de 9 millions d’euros en 2022. Les investisseurs existants avaient alors renouvelé leur confiance et investi aux côtés de Serena (via le fonds tech et impact Racine² de MGEN, avec makesense), Motier Ventures (le family-office des Moulin-Houzé) et Verve Ventures. Pour la suite, la néobanque a misé sur un tour de crowdequity de 2,5 millions d’euros début 2024. De son côté, Green-Got a récolté près de 7 millions d’euros en deux tours de crowdequity (en 2023 et en 2024), ainsi que 3 millions d’euros auprès de deux investisseurs institutionnels. “Une levée de fonds auprès de nos investisseurs historiques, VC Pale Blue Dot et Masham Investments, est aussi en cours. Nous la finaliserons début 2025”, affirmait fin 2024 à mind Fintech Maud Caillaux, cofondatrice et CMO de Green-Got. Green-Got et Helios poursuivent leur chemin Alors que canB a déclaré forfait il y a un an, en pivotant de la néobanque à impact vers une solution d’investissement, le marché des néobanques vertes en France ne compte plus que deux pure players : Helios et Green-Got. Lancée deux mois avant OnlyOne, Helios comptait 35 000 clients payants fin 2024. Green-Got, déployée plus tard, en mai 2022, a récemment indiqué avoir atteint les 60 000 clients, dont 15 000 en Belgique. Les nombres de clients des néobanques et banques en ligne présentes en France Alors qu’OnlyOne consacrait ses ressources au développement d’une offre BtoB, ses deux concurrentes ont pleinement renforcé leurs offres à destination des particuliers. Elles ont d’abord porté leurs efforts sur l’investissement et l’épargne, avec le lancement de contrats d’assurance vie, avant de proposer plus récemment des comptes premium (déployés en juillet 2024 chez Helios et en février 2025 chez Green-Got). Les deux sociétés ont également introduit un compte pour les indépendants. Chez Green-Got, Maud Caillaux indiquait même fin 2024 : “nous prévoyons un lancement du compte pro fin 2025, après en avoir obtenu l’autorisation via notre demande d’agrément d’établissement de paiement (EP)”. Quant à Helios, le projet n’est pas attendu à court terme, bien qu’envisagé. “Helios n’a pas vocation à aller sur le BtoB dans les trois prochaines années”, précisait ainsi sa cofondatrice et présidente, Maeva Courtois, à l’automne 2024. Le modèle économique complexe des néobanques BtoC Les questionnements stratégiques et la fin d’activité d’OnlyOne rappellent à quel point le segment des néobanques BtoC est compliqué. Chez les généralistes, de nombreux projets ont été abandonnés (Morning, Ma French Bank, Orange Bank, C-zam…). Sur la niche des ados, Vybe a fermé et Kard a été repris en octobre 2024 après une mise en liquidation judiciaire. Seuls les acteurs les mieux financés, capables d’atteindre un volume suffisant pour trouver le point d’équilibre, demeurent sur le marché. Les néobanques vertes se sont toutefois lancées avec un modèle différent de celui des généralistes comme Revolut, N26 ou BoursoBank. “Contrairement aux premières néobanques qui proposaient des comptes gratuits, nous sommes structurellement voués à gagner de l’argent avec notre offre payante”, affirmait Maud Caillaux fin 2024. “Bien que leur taille soit inférieure aux autres néobanques présentes sur le marché, le choix de ne pas recourir aux primes de bienvenue ni aux programmes de parrainage allège leurs charges financières, tout comme l’absence d’offre gratuite”, observait également Lorenzo Bertola, directeur général adjoint du cabinet de conseil mc2i et responsable de son pôle banque, finance et assurance. À titre d’exemple, la néobanque verte allemande Tomorrow – qui a montré la voie aux néobanques à impact françaises – a annoncé à l’été 2024 avoir atteint ses premiers mois de rentabilité avec une centaine de milliers de clients. Caroline Soutarson finance durablenéobanque Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire À l'occasion du lancement de son compte premium, Green-Got augmente ses tarifs La néobanque pour les pros Finom se sépare de Solaris en Allemagne Confidentiel [Info mind Fintech] En 2023, Green-Got a dépassé le million d’euros de chiffre d’affaires Helios a fléché 10 millions d’euros vers la transition écologique Dossier Pour les néobanques vertes, les comptes premiums deviennent une priorité Helios lance son compte premium Entretien Léo Miranda : “La Nef a bénéficié de la communication des néobanques vertes”