Portugal : les élections législatives se jouent sur des enjeux liés au travail

Selon les sondages les plus récents, les élections législatives portugaises anticipées du 18 mai, les troisièmes depuis 2021, vont répartir une large majorité des suffrages entre trois partis : la coalition sortante Alliance Démocratique (centre droit), le Parti socialiste et le parti Chega (extrême droite). Si tous proposent une hausse conséquente du salaire minimum, ils divergent sur les moyens à mobiliser pour redresser la natalité, améliorer les conditions de travail, ou encore le rôle à accorder au dialogue social. Tour d’horizon.

Par Gilmar Sequeira Martins. Publié le 12 mai 2025 à 11h26 - Mis à jour le 16 mai 2025 à 11h04

Les programmes des trois partis susceptibles de réunir le plus grand nombre de députés, voire de parvenir à engranger une majorité confortable ou absolue le 18 mai, date des élections législatives anticipées au Portugal, s’accordent pour que le salaire minimum mensuel atteigne 1.000 euros à brève échéance. Ils adoptent cependant des options passablement différentes pour lever les nombreux obstacles – marasme démographique, manque de main-d’œuvre, faible niveau de formation de la population active, émigration des plus diplômés, concertation sociale déficiente – qui empêchent le pays de réduire la pauvreté et de développer son tissu industriel. 

Un salaire minimum à 1.000 euros en 2026 ?

Tant la coalition Alliance Démocratique (AD) que ses deux principaux concurrents, le PS et Chega, proposent une augmentation rapide du salaire minimum national (SMN), actuellement fixé à 870 euros mensuels sur 14 mois (soit 1.015 euros sur 12 mois). Si l’AD et le PS font une proposition identique et souhaitent porter le SMN à 1.100 euros en 2029, Chega va plus loin avec 1.000 euros dès 2026 et 1.150 euros en 2029. Il y ajoute également deux autres mesures : assurer le paiement intégral des heures supplémentaires et les exonérer d’imposition fiscale et de cotisation sociales mais aussi réduire de 50% l’imposition fiscale et le taux de cotisation sociale des heures de nuit.

Soutien à la parentalité

Pour redresser une natalité en berne qui conduit à une baisse de la population portugaise (-32.596 en 2023 et -40.640 en 2022), les trois partis rivalisent de propositions. Si tous s’accordent pour faciliter la vie des jeunes parents, que ce soit à travers une plus grande flexibilité horaire ou le télétravail, seul le PS propose d’augmenter le nombre de places dans les crèches. De leur côté, l’AD et Chega proposent des déductions fiscales pour les entreprises qui créeront des crèches internes. Si le PS et Chega souhaitent augmenter la durée du congé parental, ce dernier est le seul à proposer d’augmenter la durée du congé accordé en cas de fausse couche.

Conditions de travail : des objectifs différents

Sur les conditions de travail, les trois partis en lice visent des objectifs différents. Le programme de l’AD se concentre sur les actions en faveur des femmes : atteindre l’égalité salariale avec les hommes (le Portugal occupe le 15e rang de l’UE dans ce domaine), renforcer les contrôles sur l’égalité salariale en recourant à la technologie et augmenter grâce à des quotas le nombre de femmes dans les comités exécutifs. Le PS souhaite de son côté “renforcer et densifier la législation encadrant les algorithmes, l’intelligence artificielle et les dispositifs technologiques de contrôle du travail” afin notamment “d’assurer l’égalité de traitement” et “augmenter le contrôle sur ces nouvelles dimensions des relations professionnelles”. Les propositions de Chega sont sous-tendues par la pénurie de main-d’œuvre puisqu’il propose de développer les contrats “zéro heure” pour les demandeurs d’emploi et les retraités ainsi que des stratégies de prévention des risques psychosociaux au travail.

Priorité au dialogue social

L’AD affiche sa volonté de voir le législateur moins impliqué dans les relations sociales. Elle souhaite faire de la concertation et du dialogue social les “formes privilégiées d’évolution du marché du travail” mais aussi un levier de convergence entre partenaires sociaux afin d’augmenter la productivité. Le PS compte renforcer le dialogue social avec trois mesures clés : accorder aux représentants des salariés une place dans les conseils d’administration des entreprises ; élargir les thématiques de négociation des conventions collectives pour y intégrer la responsabilité sociale et environnementale, la promotion du bien commun et l’élaboration de programmes permettant de prévenir le harcèlement ; enfin permettre aux “travailleurs indépendants en situation de dépendance économique” d’accéder à une représentation collective. La thématique est en revanche absente du programme de Chega.

Mettre l’accent sur la formation professionnelle

Si Chega se borne à envisager une restructuration de l’Institut de l’emploi et de la formation professionnelle afin de le concentrer sur l’emploi, les autres partis affichent plus d’ambition. L’AD compte ainsi favoriser l’emploi des jeunes en combinant formation professionnelle et soutien à l’embauche. Pour favoriser une montée en gamme du tissu industriel, le parti veut lancer plusieurs programmes pour permettre aux entreprises d’accueillir des jeunes titulaires d’un doctorat, développer la formation des cadres techniques intermédiaires ou encore former les demandeurs d’emplois de plus de 50 ans. Le PS propose de son côté une mise à jour du Catalogue national des qualifications et la création d’un réseau de formation professionnelle spécialisée par secteurs.

Dissensions sur la protection sociale

Pour l’AD et Chega, la question de la protection sociale se résume en un verbe, “simplifier”, qu’il s’agit d’appliquer, pour la première, au système des prestations sociales, et, pour le second, au régime des accidents du travail, sans apporter plus de précisions. Plus prolixe, le PS affiche un double objectif : augmenter les ressources de la sécurité sociale en augmentant la contribution des entreprises et améliorer la santé et sécurité au travail avec deux outils : une nouvelle stratégie capable de relever le défis des risques émergents et une révision du Tableau national des incapacités consécutives à un accident du travail.

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