Accueil > Marques & Agences > Comment intégrer la transition écologique dans les activités médias et marketing : ce qu’il faut retenir de notre conférence mind Media Day du 4 avril 2023 Comment intégrer la transition écologique dans les activités médias et marketing : ce qu’il faut retenir de notre conférence mind Media Day du 4 avril 2023 Plus de 500 personnes étaient présentes mardi 4 avril au Théâtre de la Madeleine à Paris pour assister à la première édition de notre conférence mind Media Day. Au programme : comment concilier la réduction énergétique avec les performances business des entreprises du secteur de la tech, des médias et de la communication. En voici le compte rendu. Par Clémence de Ligny avec Jean-Michel De Marchi. Publié le 07 avril 2023 à 16h37 - Mis à jour le 20 octobre 2023 à 17h39 Ressources Politiques industrielles des groupes médias en matière d’impression papier, de formation des salariés et de nouveaux projets “plus responsables”, évolution des rédactions et de leur traitement éditorial de l’actualité, intégration et standardisation de la mesure de l’impact carbone dans les stratégies et dans les métriques de l’industrie de la publicité, stratégies publicitaires, auto-régulation du secteur… Avec la participation de : Agnès Pannier-Runacher (ministre de la Transition écologique), Agathe Bousquet (Publicis et AACC), Olivier Roz (Groupe La Poste), Souaade Agmir (Publicis Media), Malaïka Coco (Groupe Bel), Capucine Pierard (Groupe Havas Media), Jean-Luc Chetrit (UDM), Patrick Gouyou Beauchamps (Udecam et Values), Philippe Carli (EBRA et APIG), Louis Dreyfus (Groupe Le Monde), Valérie Salomon (CMI France), Christelle Chiroux (TF1), Éric Valmir (Radio France), Jérôme Chapuis (La Croix), Eglantine Leclabart (Canal+ France), Corinne Mrejen (Les Echos-Le Parisien Partenaires et SRI), Arthur Millet (Alliance Digitale), Bruno Ricard (366), Bénédicte Lesage (Arcom), Véronique Pican (Equativ), Benjamin Davy (Teads), Adrien Delambre (Greenbids), Valérie Decamp (Mediatransports), Karine Rielland-Mardirossian (Media.Figaro), etc. Agnès Pannier-Runacher (ministre de la Transition énergétique) : “Je compte sur l’industrie pour aller plus loin encore” LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE TRANSFORME LES PRATIQUESAU SEIN DES GROUPES DE PRESSE Entre un contexte économique difficile et la pression grandissante des consommateurs, des collaborateurs et des pouvoirs publics devant l’urgence climatique, les enjeux sont de taille pour les groupes de presse, que ce soit en termes d’optimisation de la consommation d’énergie pour les activités numériques, la production industrielle liée à l’impression des journaux et magazines, la logistique ou la distribution. Pour réduire son empreinte carbone, les éditeurs ont engagé des dispositifs pour mesurer leurs émissions. Et c’est ce que les trois groupes de presse présents pour notre table ronde, à savoir le groupe EBRA avec son PDG Philippe Carli, Le Monde avec Louis Dreyfus et le groupe CMI France avec Valérie Salomon, ont choisi de faire, en entamant chacun de leur côté un bilan carbone et un audit auprès de leurs clients, collaborateurs et fournisseurs. Le groupe de PQR EBRA (Le Progrès, Le Dauphiné Libéré, Les Dernières Nouvelles d’Alsace, L’Est Républicain…) indique une empreinte carbone de 75 000 tonnes de CO2 par an. Notre synthèse : Comment intégrer la transition écologique dans les performances des médias et de la publicité “Il y a une très forte demande de nos clients et de nos salariés pour avoir une démarche RSE, a ainsi souligné Philippe Carli, le PDG d’EBRA. C’est vrai pour notre groupe, mais aussi pour les autres titres de l’APIG. Il faut s’assurer, à tous les stades de notre production industrielle, de minimiser notre impact carbone. Concrètement, cela signifie chercher et acheter du papier recyclé – c’est 95 % de nos achats papier chez EBRA -, c’est aussi pousser à une sobriété énergétique, par exemple en récupérant une partie de l’énergie de nos imprimeries, et utiliser des encres naturelles, végétales quand c’est possible – mais c’est difficile d’en trouver sur le marché. On travaille aussi sur notre logistique pour mettre en commun des flux au sein de la presse quotidienne nationale régionale afin d’éviter de faire des doubles tournées de camions et on sélectionne le plus possible des fournisseurs les plus locaux possibles. Sur la publicité, les éditeurs médias, tous ensemble, avec le prestataire de mesure carbone DK, nous avons mis en place une calculette qui s’appuie sur des données certifiées par l’Ademe pour mesurer l’impact carbone des publications en ligne et en presse.” “On se met la pression et nous avons également la pression de nos collaborateurs, des consommateurs, des pouvoirs publics, a souligné Valérie Salomon, présidente de CMI France. Nous devons prendre des décisions exigeantes et contraignantes, en particulier en terme de production industrielle : autour du papier, de la distribution, du transport, ou encore de la sobriété énergétique et cela dans un cadre collectif et d’autorégulation. Le tout dans un contexte économique difficile. Nous avons beaucoup d’ambitions, mais c’est un vrai défi financier, pour nous, groupes médias, mais aussi pour nos fournisseurs et partenaires.” Sans surprise, pour les groupes de presse, l’essentiel du travail concerne l’activité papier et transport, qui représente en moyenne 50 % de leur empreinte carbone, selon Philippe Carli, le président du groupe EBRA et de l’APIG. C’est jusqu’à 68 % pour le Groupe Le Monde, pourtant puissant sur les activités numériques. Mais avec de la bonne volonté, les éditeurs indiquent que les initiatives ne sont pas toujours possibles, notamment pour les groupes de presse qui ne possèdent pas, à la différence du groupe EBRA, leur propre imprimerie : “Les imprimeurs sont en nombre limité et donc souvent en monopole. On a du mal à intervenir sur ces sujets-là”, a expliqué Valérie Salomon, présidente du Groupe CMI France. Un propos abondé par Louis Dreyfus (Le Monde). Le Groupe Le Monde a choisi de se concentrer dans l’immédiat sur d’autres leviers tout aussi importants, comme le numérique. Lors de la refonte du site web du Monde, l’objectif de 20 % de baisse de l’empreinte carbone avait été fixé. Une attention particulière a été dirigée également sur l’optimisation énergétique de ses bureaux à l’occasion de la construction de son nouveau siège, livré début 2020. La transition écologique passe également par les collaborateurs. Avec l’organisation de formations sur le changement climatique qui se multiplient dans les médias. Parfois aussi jusqu’à l’incitation à utiliser le vélo, en diminuant les places de parking pour voitures et augmentant au contraire celui pour les vélos, comme l’a fait là encore le groupe Le Monde autour de son nouveau siège. Sur le plan internet, CMI France agit également de plusieurs façons, dans une démarche plus globale liée à la RSE de l’entreprise. “Depuis janvier 2023, nous sommes le premier groupe de presse magazine à être labellisé Positive Work Place (label désormais baptisé Positive Company, ndlr), et pour une durée de trois ans, a souligné Valérie Salomon (CMI France). Le groupe a mis en place six groupes de travail associant ses salariés : transformation écologique, impact sociétal, RH, etc., avec l’appui des équipes d’Usbek & Rica (acquis fin 2022 par CMI France, ndlr) dans un rôle de conseil afin de mettre en place des projets et des actions pragmatiques et réalistes : sur les bâtiments, les transports des salariés et de ses marchandises, une politique d’achat responsable, etc. “Nous communiquons tous les 15 jours l’état d’avancée des projets à nos salariés”, a indiqué Valérie Salomon. Des initiatives essentielles pour avancer, mais aussi pour que tous les collaborateurs des groupes médias se sentent impliqués et que la réduction carbone soit effective. Le coût des formations ? Pour Louis Dreyfus (Groupe Le Monde), “ce n’est pas une question d’argent. […] L’important, c’est l’état d’esprit ; c’est d’arriver à ce que la direction et les salariés comprennent que l’empreinte carbone et la contrainte écologique doivent être à tout moment présents dans nos actions stratégiques et appliquées au quotidien.” Louis Dreyfus (Groupe Le Monde) : “L’enjeu RH est un point clé de la transition écologique” LE RÔLE DES JOURNALISTESDANS LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE Face à la place grandissante des enjeux environnementaux et climatiques dans l’espace médiatique, le rôle des journalistes est d’ailleurs crucial. Pour Christelle Chiroux, directrice adjointe de l’information de TF1 en charge de la médiation et de la RSE, le rôle du journaliste d’aujourd’hui est “d’informer avec de la vérification, de l’analyse, et de la pédagogie sur la transition écologique”. Une façon également de s’assurer de la neutralité de l’information et d’éviter de tomber dans le militantisme. C’est également l’avis d’Éric Valmir, secrétaire général à l’information de Radio France : “Il faut solidifier la question du fait. Si celui-ci est solide, il ne peut y avoir ces questions de militantisme.” S’ajoute alors un nouvel enjeu de taille pour les médias : former les journalistes à la compréhension des méthodes et des raisonnements scientifiques pour transmettre une information de qualité et trouver les bons experts : “On est face à un sujet colossal et tous les journalistes ne sont pas des scientifiques”, résume Jérôme Chapuis, directeur de la rédaction de la Croix. C’est ce qu’ont commencé à faire plusieurs éditeurs médias, dont le groupe TF1, qui a choisi de former un large éventail de ses collaborateurs, des journalistes aux rédacteurs en chef, en passant par les monteurs et infographistes. Des formations que devraient suivre tous les journalistes des rédactions, y compris ceux dont les sujets ne semblent pas si proches de l’écologie, afin d’éviter les dissonances éditoriales, telles “qu’un article sur les incendies causés par la sécheresse, à côté des dix destinations où s’envoler cet été pour pas cher”, affirme Loup Espargilière, fondateur et rédacteur en chef du média spécialisé Vert. Sur ce sujet, les intervenants ont d’ailleurs insisté sur le rôle qui incombe aux écoles de journalisme, qui aujourd’hui commencent à prendre conscience de leur retard sur cet aspect. Une chose est certaine et les directions éditoriales l’ont intégré. “L’écologie doit irriguer aujourd’hui toutes les rédactions, les services économiques, politiques, culturels, société et information générale, car c’est un sujet central”, a conclu Éric Valmir. Julie Richards (The Guardian) : “Nous avons réduit nos émissions carbone de 30 % en deux ans” COMMENT RÉDUIRE L’EMPREINTE CARBONE DE LA VIDÉO Qu’il soit destiné à l’information ou au divertissement, le format vidéo est un format très émetteur de carbone. Invitée à partager la vision et les initiatives de Canal+ en lien avec son offre Canalplay, Eglantine Leclabart, directrice générale adjointe de Canal+ France en charge du marketing et du digital, a rappelé ici que de l’impact carbone du numérique provient de 60 à 70 % du matériel. La plateforme a donc lancé fin 2022 un décodeur “éco-conçu”, dont la fabrication permet de réduire de 40 % l’impact carbone comparé aux décodeurs précédents. Sur sa plateforme vidéo, Canal+ a également cherché à estimer l’impact d’une heure de visionnage : la fourchette oscille entre 10 et 100 grammes d’équivalent CO2 en fonction du type d’écran, de la résolution de l’image, etc. Pour réduire cet impact, le groupe a travaillé sur l’optimisation des codecs, de manière à optimiser le débit, sans réduire la qualité de l’équipement du client. En tant que média, Canal+ cherche également à sensibiliser sur les enjeux climatiques. D’une part en réalisant des séries écoproduites, par exemple en limitant les déplacements en avion ou en respectant la faune et la flore sur les lieux de tournage. Et d’autre part, en proposant des contenus destinés à sensibiliser son audience. 95% des abonnés Canal ont en effet déclaré être sensibles au sujet et que la plateforme avait un rôle à jouer. Côté publicité, Canal Brand Solutions, la régie publicitaire de Canal+, a mis en place un projet, L’étiquette carbone”, qui a pour vocation d’accompagner les annonceurs et d’afficher l’impact carbone des publicités, afin qu’ils puissent avoir l’information et prendre les meilleures décisions possibles en connaissance de cause. Le prochain chantier pour Canal+ concerne la diffusion en direct, notamment celle des événements sportifs. Deux projets sont actuellement en cours de développement pour optimiser l’impact carbone, avec le soutien de l’ADEME. “Notre rôle au quotidien, c’est de satisfaire nos abonnés et d’améliorer en permanence l’expérience. À travers toutes ces initiatives, on essaie de compenser l’impact carbone, sans dégrader l’expérience et la possibilité de consommer”, a souligné Églantine Leclabart. Un défi que Canal+ tente de relever dans un contexte où les consommations de vidéos sont en augmentation constante. La mesure des émissions carbone dans la publicité en ligne reste encore marginale ÉCONOMIE PUBLICITAIRE :L’ENJEU DE LA STANDARDISATION ET DU COÛT DU MÉDIA La crise climatique concerne aussi et particulièrement l’industrie de la publicité qui a joué un rôle majeur dans le développement de la société de consommation ; ce que les professionnels du secteur expriment désormais avec lucidité. À l’image de Corinne Mrejen, administratrice du SRI et directrice générale du pôle Les Echos-Le Parisien Partenaires et chief impact officer du groupe. La transition écologique aura un impact dans l’économie publicitaire, mais il est incontournable et nécessaire, selon nos intervenants : “On doit envisager ce coût comme un investissement et non comme de l’inflation au sein de la chaîne de valeur publicitaire”, a insisté Corinne Mrejen. Un propos qui est, du moins pour l’instant, souvent acquiescé par les dirigeants des agences. Se pose désormais la question de l’intégration de ce coût dans une économie publicitaire déjà fragile, notamment en définissant de nouveaux KPI ou en imaginant un ROI qui intégrerait de nouveaux critères, tels que l’impact sur l’environnement. De premières pistes de travail sont évoquées sur ce point. Enfin la question d’une mesure carbone véritablement standardisée, sujet central pour la profession, reste encore à créer. Jusqu’à présent, chaque acteur de l’industrie développait dans sa propre calculette carbone et ses référentiels. Un problème que l’Union des Marques veut résoudre en annonçant officiellement, lors de cette première édition du mind Media Day, son méta-référentiel de la mesure de l’impact carbone. “L’objectif n’est pas de créer une nouvelle mesure à part, a indiqué Jean-Luc Chetrit, directeur général de l’UDM, mais de donner un cadre comparatif pour intégrer et harmoniser l’ensemble des méthodes afin de permettre aux calculettes d’être utilisées avec des bases communes et transparentes et ainsi avoir une vision d’ensemble et pouvoir comparer”. L’UDM lance son méta-référentiel En matière de mesure carbone, “la France se positionne en précurseur de la publicité responsable. Le marché a un ou deux ans d’avance sur les autres”, a souligné Arthur Millet, le directeur général d’Alliance Digitale, récemment nommé président de la commission publicité durable de l’IAB Europe. Il a également insisté sur l’importance pour les vendeurs et les acheteurs médias de travailler sur les mêmes périmètres de mesure. SRI et Udecam tardent en effet à trouver une base comparable commune. Les deux associations ont le même objectif, mais pas la même façon, ni le même timing pour y parvenir. Là où le SRI, appuyé par Alliance Digitale et l’UDM – et les autres associations professionnelles des vendeurs médias – effectue un démarche pas à pas, et veut d’abord mesurer les émissions carbone, avant de viser plus loin, l’Udecam veut, elle, mesurer un impact plus large de l’impact des activités et produits sur l’environnement, englobant les émissions carbone, mais pas seulement. “Nous nous basons sur la méthode PEF, de l’Union européenne, qui est déjà prévue par les textes européens et sera en place dans les toutes prochaines années,” a ainsi expliqué Patrick Gouyou Beauchamps, responsable de la commission RSE de l’Udecam et président de Values. Arthur Millet (Alliance Digitale) : “Il y a un fort enjeu à démontrer que la sobriété énergétique permet d’obtenir la même efficacité publicitaire” MESURE CARBONE ET MESURE DE LA PERFORMANCEDE PLUS EN PLUS LIÉES La mesure carbone elle-même et son intégration dans les analyses des campagnes sont complexes au niveau opérationnel mais essentielles. Depuis trois ans, de plus en plus d’outils de mesure carbone se développent, mais il faut aller plus loin désormais, estime Adrien Galerneau, fondateur de DK : “On voit que la mesure ne suffit plus, il faut maintenant mener des plans d’actions concrets et intégrés dans les opérations.” L’enjeu pour les annonceurs est désormais l’intégration de nouvelles métriques liées à l’impact carbone avec les indicateurs d’efficacité classiques des opérations marketing. “Si on fait une campagne et que l’on passe à côté de sa cible, on aura généré beaucoup d’émissions carbone pour rien. Ne serait-ce que le ciblage, c’est déjà un élément à prendre en compte lorsqu’on essaye de mesurer l’impact carbone”, a ainsi rappelé Bruno Ricard, directeur général adjoint marketing, communication et études de la régie publicitaire 366. “On doit aussi parler du business model des entreprises et de l’impact carbone des ventes réalisées par les publicités.” Sur ce point, le marché se dirige vers l’intégration de la mesure carbone dans le media planning, avec l’enrichissement des modèles de marketing mix modeling (MMM), comme l’ont présenté Havas Media et Ekimetrics. Un risque est largement évoqué : le secteur publicitaire étant très concurrentiel, l’arrivée de nouveaux référentiels et de nouvelles métriques peut faire peur et pousser les annonceurs et régies publicitaires à travailler chacun de leur côté. Pour Capucine Pierard, vice-présidente d’Havas Media Group France, développer les partenariats et la coopération est un impératif et doit être le prochain chapitre de la transition : “Il faut cesser la compétition et entrer dans une phase de co-construction, ensemble, avec toutes les parties prenantes de notre marché pour améliorer l’environnement au profit des marques que l’on accompagne.” Capucine Pierard (Havas Media Group) : “Les entreprises qui ne prennent pas le virage de la transition écologique seront tôt ou tard condamnées” Enfin, si les données issues de la mesure carbone sont essentielles, elles ne seront pas suffisantes à elles seules aux entreprises pour optimiser leur transition écologique. Pierre Harand, co-CEO de Fifty-Five, préconise ainsi la constitution de tableaux pour agréger tous les flux de données marketing des sociétés, dont celles liées à la mesure, afin d’analyser finement les assets, leur impact et de prendre les bonnes décisions : Une calculette livre des moyennes sur une campagne, donc sur un aspect seulement de l’activité publicitaire et marketing. C’est une photographie. Il faut aussi le contexte, aller beaucoup plus en profondeur et dans la granularité : le stockage de données, le cloud utilisé, l’empreinte du site web, etc.”, estime-t-il. CONTRATS CLIMAT :UN BILAN MITIGÉ En juillet 2022, les premiers contrats climat ont été signés dans le but de fixer les orientations du secteur de la publicité pour limiter son empreinte carbone et pousser la profession à s’autoréguler. Neuf mois plus tard, le bilan est mitigé, mais non sans espoir. Le point positif : à ce jour, 141 entreprises sont signataires, dont 45 % d’entreprises non-assujetties et donc engagées de manière volontaire. Le point négatif : pour les entreprises assujetties, un tiers n’a pas respecté son obligation de déclaration et seules 18 % d’entre elles ont finalement souscrit à un contrat climat. Le compte n’y est donc pas. Par ailleurs, pour celles qui ont souscrit, plusieurs failles ont été observées, dont un manque cruel d’indicateurs de suivi pertinents et précis pour permettre d’évaluer les progrès faits au fur et à mesure des années qui passent. “Il faut que le secteur publicitaire se dépêche sur ces sujets-là”, a indiqué Bénédicte Lesage, membre du Collège de l’Arcom et présidente du groupe de travail “Éducation aux médias, transition écologique et santé publique”. De son côté, Agathe Bousquet, membre du conseil d’administration de l’AACC et présidente de Publicis Groupe France, qui a cotravaillé sur la mise en place de ces contrats, veut rester optimiste : “L’envie est là, c’est un démarrage, il y a encore beaucoup d’efforts de pédagogie à faire. Les annonceurs voient ces contrats comme un cadre contraignant, alors qu’en réalité, c’est un nouvel élan.” Pour elle, les prochaines étapes sont claires : il faut communiquer davantage sur ce que sont réellement ces contrats et sur les bonnes pratiques, les méthodologies utilisées et les résultats. Sur ce point, l’Arcom va réunir un comité de suivi des contrats climat dès juin, dont l’objectif sera “d’accentuer la promotion et la communication des contrats climat et de rassembler tous les acteurs pour ajuster et éclaircir la compréhension des enjeux de ces contrats”, selon Bénédicte Lesage. Les contrats climat doivent encore faire leurs preuves LES SOCIÉTÉS ADTECH,UNE POSITION CENTRALEDANS LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE L’ensemble du secteur en a pris conscience : la publicité programmatique, telle qu’elle est conçue aujourd’hui, fait consommer trop d’énergie aux éditeurs comme aux marques pour une efficacité parfois relative voire absente, a minima difficile à constater. De la production à la diffusion de la création et à l’activation média, en passant par les ressources de stockage avec les data centers, les facteurs d’émission carbone sont multiples, mais pourtant facilement optimisables pour limiter l’impact carbone, selon nos intervenants, pour peu que les professionnels veuillent se pencher sur le sujet des intermédiaires et examiner en détail lesquels sont efficaces, pour quel coût et pour quel apport. Pour Véronique Pican, managing director France d’Equativ, les sociétés adtechs ont une “position de choix dans la chaîne de valeur”, car situées à l’intersection entre l’information entrante et sortante, permettant une réelle analyse des données. Plusieurs leviers sont possibles : filtrer les inventaires, optimiser la distribution en choisissant les formats et les “devices” les plus appropriés et les moins énergivores, ou encore améliorer le reporting en réduisant le nombre de pixels côté annonceurs, comme utilisateurs. Une multitude de paramètres qui peuvent facilement s’adapter aux besoins des annonceurs et à leurs objectifs de campagne. “Chacun à son échelle, on a la possibilité de faire progresser l’industrie”, a souligné Véronique Pican. Brian O’Kelley (Scope3) : “Le programmatique est le plus gros problème à résoudre pour parvenir à une publicité durable” Benjamin Davy, sustainability director de Teads, lui, est convaincu qu’il est possible d’agir sans intégrer des mesures supplémentaires : “On peut déjà faire des choses très intéressantes en regardant comment évolue dans le temps l’empreinte carbone en nombre de serveurs ou même d’unités de calcul par compression. L’infrastructure est un coût et nous avons tous du monitoring déjà en place pour ces ressources.” La question des plateformes, qui captent 80 % du marché publicitaire en ligne et dont les technologies et outils sont incontournables pour l’adtech, est évidemment un enjeu clé. Selon les acteurs du secteur, ils ne semblent pas très engagés sur le sujet de la décarbonation de la publicité en ligne et manquent de transparence. Adrien Delambre, CRO et cofondateur de Greenbids, prône ici la mise en place d’une coalition interprofessionnelle et en appelle aux marques : “Il ne faut pas se mettre au tempo de ces plateformes, mais plutôt leur imposer notre propre tempo. Et pour ça, les budgets annonceurs peuvent être un bon moyen de pression pour bouger dans la bonne direction”. 5 leviers activables par les sociétés adtechs pour réduire leur impact carbone MARKETING D’INFLUENCE :UN LEVIER IDÉAL POUR AGIR ? Devenu un canal incontournable pour les marques, le marketing d’influence est également remis en question pour ses dérives consommatrices. Les influenceurs ont un rôle à jouer pour sensibiliser aux enjeux climatiques et montrer l’exemple, tout comme les marques qui souhaitent travailler avec eux. Plusieurs chartes, certificats et labels ont vu le jour ces dernières années pour tenter d’encadrer et pousser à l’autorégulation les marques et les influenceurs dans leurs stratégies de communication. C’est par exemple ce qu’a fait Agathe Nicolle, CEO de Woô, qui a travaillé sur la création d’une Charte d’éthique du marketing d’influence dès 2018. Quelques exemples d’actions possibles pour les influenceurs : privilégier le train à l’avion, réfléchir à la qualité des partenariats et aux messages véhiculés dans les posts… Un travail qui doit être réalisé des deux côtés pour la CEO : “C’est aussi aux marques de faire en sorte que les influenceurs soient certifiés, pour qu’elles aussi aient un impact.” Pour Amélie Deloche, fondatrice de Post Influence et de Paye ton Influence, il y a aussi un enjeu de sensibilisation et de formation des influenceurs aux enjeux écologiques : “on se rend compte aujourd’hui que certains influenceurs ne se sentent pas légitimes, car ils ne sont pas forcément sensibilisés ou formés aux enjeux climatiques. Or, la formation mène à l’action.” Un enjeu réel, également côté marques, a observé Malaïka Coco, la responsable communication et influence responsable du groupe Bel : “On veut vraiment être connecté à nos cibles. Et pour cela, il faut qu’on garantisse des ambassadeurs authentiques et affinitaires avec nos enjeux de marque.” Plusieurs leviers ont été activés au sein de l’entreprise pour développer des partenariats plus vertueux avec les influenceurs, notamment la mise en place de KPI précis. Une stratégie qui semble porter ses fruits. “On a remarqué un vrai impact business sur nos campagnes”, a-t-elle affirmé. Alors faut-il renforcer ces initiatives par la loi ? Les avis sont mitigés. D’un côté, la loi évolue trop lentement pour un secteur qui se développe toujours plus vite. De l’autre, imposer un cadre légal pourrait au contraire inciter par exemple les influenceurs à être plus transparents quant à l’impact carbone des campagnes et produits qu’ils promeuvent. L’influence marketing réfléchit à des pistes de réduction de son impact environnemental UNE ÉVOLUTION ATTENDUEDANS LE TRADING PUBLICITAIRE Comment les régies, les agences et les marques peuvent travailler ensemble et développer leurs activités de façon plus vertueuse sans perdre en efficacité ? C’est tout l’enjeu actuel du secteur de la publicité. Plusieurs leviers sont possibles, comme le choix du média utilisé par les annonceurs et les régies publicitaires. La presse, la radio, la télévision, l’affichage, tous n’ont pas la même consommation énergétique : “La publicité extérieure, c’est six fois moins de carbone que le digital et 17 fois moins que la télévision”, a illustré Valérie Decamp, directrice générale de la régie Mediatransports. “On a tous mis en place un calculateur empreinte carbone. On a donc aujourd’hui la possibilité de choisir nos campagnes en fonction de performances responsables.” À condition de répondre aux objectifs des annonceurs et des agences. Corinne Mrejen (SRI et Les Echos-Le Parisien Partenaires) : “Nous plaidons pour que les acteurs les plus vertueux soient valorisés dans les plans médias” La vidéo, par exemple, est aujourd’hui un média incontournable pour le monde de la publicité et ce, malgré des émissions carbone conséquentes. Pour pallier ce problème, Le Figaro a choisi de travailler avec Vidmizer, société française qui propose une plateforme SAS qui permet d’encoder, de compresser les vidéos et de réduire de 40 % à 80 % les émissions de CO2. “Nous pouvons agir avec ce type de solution pour la vidéo, et agir sur la chaîne programmatique, via la réduction du nombre de partenaires présent dans notre fichier ads.txt”, a souligné Karine Rielland-Mardirossian, directrice générale déléguée au digital de Media.Figaro, qui est ainsi passé de 790 lignes à 243 lignes dans Ads.txt, “soit une réduction 75 % nos émissions CO2 (source Scope 3)”. La régie agit aussi sur la réduction de l’empreinte carbone associée aux requêtes publicitaires, “avec déjà 975 tonnes en moins”, et en favorisant l’accès direct à ses inventaires sans intermédiaire avec Hubvisor ici comme partenaire technologique. D’autres solutions existent pour agir en limitant le nombre d’intermédiaires dans la chaîne de valeur programmatique. Notamment sur les DSP, parmi lesquels TheTradeDesk a plusieurs fois été cité en exemple Une solution qui permet d’ailleurs “d’optimiser la performance” pour Souaade Agmir, head of trading digital de Publicis Media France, qui a prévenu que le groupe écartera de son planning média les acteurs jugés non efficaces. Souaade Agmir (Publicis Media) : “Nous nous passerons de certains partenaires s’ils ne sont ni engagés, ni utiles dans la transition écologique” Une multitude d’offres existent donc. Pourtant, les entreprises qui les utilisent sont encore peu nombreuses. “Les offres qui sont légitimes pour accompagner les publicités responsables ne sont parfois pas évidentes à gérer au quotidien et peuvent alourdir l’exécution. Mais les marques ont leur part de responsabilité, elle n’utilise pas assez les offres disponibles”, a regretté Valérie Decamp. Pour Olivier Roz, directeur médias et médias digitaux du groupe La Poste, les marques doivent effectivement se responsabiliser et être proactives : “Si les annonceurs n’achètent pas ces offres, c’est peut-être parce qu’ils ne comprennent pas la problématique. Mais nous devons, nous annonceurs, nous y intéresser, nous former et mettre en adéquation nos discours et nos actes : la qualité, cela se paie. Je suis prêt à acheter plus cher des campagnes plus vertes et plus vertueuses si elles répondent à mes attentes marketing et qu’on me le montre. Là encore, former et sensibiliser les équipes, les annonceurs et le top management représente un enjeu majeur. “Les outils sont là, donc maintenant c’est à nous, annonceurs, d’inciter le marché à agir”, a souligné Olivier Roz. La Poste a réduit son empreinte carbone marketing de 20 % depuis 2019, date de ses premières initiatives concrètes en lien avec son agence Publicis. Le groupe vise 30 % de réduction supplémentaire. Tous nos contenus liés à notre conférence sur la transition écologique du secteur : #mindMediaDay Clémence de Ligny avec Jean-Michel De Marchi Achat médiaAdtechMesure carbonemind Media DayPublicité programmatiqueRéglementationRelations agences-annonceursRHRSEStratégies annonceursTransformation marketingTransition écologiqueTransparence Besoin d’informations complémentaires ? 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